mardi 11 août 2009

Congés

Un château de sable, quatre tours, une ouverture sur la mer, des contreforts de cailloux volcaniques bien noirs. Les murs sont inclinés, épais. Le donjon central ; d’autant plus solide que le héros est de guet au sommet.

Jusque-là le mystère est préservé...

Des ouvrages d’art semblables, il y en a des centaines. Toutes les saisons d’été et toutes les plages où nous débarquons par millions, sont affublées de ces faux grès d’arènes. Imitations réussies, pénibles à voir, fantaisistes d’autres poliorcétiques plus adultes. Celles-ci, moins propices au déni, par le sang encore frais coagulant sur les murs de granits et de basaltes, prétendent résister mieux et plus anonymement aux siècles et aux érosions. Elles ne gardent ni les mêmes grèves, ni les mêmes falaises, et ne subissent pas les mêmes ravinements.

Pourtant toutes tiennent et continueraient à tenir encore les monts de nos rêves si nous ne nous avisions pas de les nommer, lieu, propriétaire, maître d’œuvre ou ravisseur : jusqu’à ce qu’elles entrent en histoire comme on dit en couches, jusqu’à ce qu’elles sédimentent la même mort qui dégoulinait dans leurs culs-de-basse-fosse. Héros et châteaux ont le bénéfice du doute jusqu’à ce qu’on leur invente une chronique, une étiquette et un annuaire.

Mais cette fois, je fus pris au dépourvu dans mes remparts, affirmations dernières et mâchicoulis incertains. Le mystère fut sali de clarté. Un gamin passa près de l’ouvrage et du brave audacieux. Un gosse en balade avec ses parents. Un mécréant de lardon. Un chiard envahisseur... Un cuistre de moutard ! Pétri de science télévisuelle, sorcier de cette nouvelle magie, il reconnut, sans hésiter une seconde, le vaillant qui veillait au grain et lui jeta un sort : il le nomma.

Il n’était personne, mon valeureux, il était sans âge, mon personne-âge. Il était heureux de sa bravoure silencieuse face à l’orage des siècles et accessoirement face à la mer qui montait

Il chut pourtant, d’abord potentiel et poétique, au rang d’homme-araignée caoutchouteux, en vente dans toutes les bonnes épiceries destinées aux parfaits petits consuméristes (PPC). L’idiot du village persista dans sa signature et fit les commentaires adéquats sur les autres plastocs de la gamme, tout en devisant, stéréophonique, avec ses parents silencieux épatés qui l’escortaient par là...

Ayant assuré le monde d’une tranquillité sans faille du fait de sa connaissance, l’hydre finit par s’éloigner avec ses implants-géniteurs et je songeais dépité que mes créatures ne devenaient, elles, des braves que lorsque je les baptisais d’une histoire originale.

La première vague de la marée montante lécha, comme pour une première dégustation, le contrefort de la citadelle « sabuleuse »... La tour ouest s’inclina...

Maudites vacances.

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